La semaine dernière, j’ai eu un travail inhabituel à faire ! Une dame m’a déposé un grand plat en faïence de Quimper. Il est composé d’un décor bretonnant d’époque Porquier Beau (fin XIXè). Ce plat n’avait pas été terminé à l’époque : la cuisson d’émaillage permettant de fixer le décor n’ayant pas été faite, celui-ci était très abîmé et risquait à terme de disparaître…
En effet, sans cuisson, l’émail et les couleurs sont réduits à l’état de poudre, et en touchant le plat on s’en met plein les doigts ! J’ai donc terminé le travail en réalisant cette fameuse cuisson. Après renseignements auprès d’une salariée des faïenceries Henriot (toujours en fonctionnement depuis 1690 !), j’ai placé le plat dans le four et programmé une cuisson jusqu’à 940°C, température idéale pour les faïences. Pour ma part, je monte jusqu’à 980°C, mais j’ai préféré suivre les conseils de cette dame.
Après plusieurs heures de cuisson, le four a enfin révélé les belles couleurs et la dextérité du peintre de l’époque, je vous laisse admirer le travail en images.
Voici le plat avant la cuisson d’émaillage. On voit que les décors sont abîmés à force d’avoir été touchés car à ce stade de la fabrication, l’émail et les couleurs sont réduits à l’état de poudres* qui partent ou s’estompent au contact des doigts. La frise de rinceaux bleus a quasiment disparu sur le bord en bas à gauche. La femme assise et le puits ont également été estompés.
*Les décors sont peints « sur émail » : tout d’abord, on plonge le plat dans un bain d’émail liquide. Une fois sec, on peint les décors avec des engobes (argiles colorées) sur cet émail poudreux. Il n’y a pas de droit à l’erreur possible car si vous souhaitez recommencer une partie ratée, vous enlevez l’émail en même temps que l’engobe !
Voici ce que cela donne une fois cuit. Les couleurs sont beaucoup plus vives ! On peut distinguer les détails et les coups de pinceaux du peintre.
à l’origine, il y avait un liséré jaune sur tout le pourtour du plat (il n’y a qu’un tout petit bout visible en haut à droite).
Trois danseuses bretonnes avec leurs coiffes et leurs tenues traditionnelles dansent pieds nues.
Ici on remarque une quatrième bretonne qui est assise. Elle porte des sabots de bois à ses pieds. Il y a un genre d’amphore à côté d’elle. C’est le personnage le plus effacé.
Remarquez les détails dans le feuillage juste derrière elle, les nuances dans les verts sont remarquables !
Ici ce sont deux musiciens qui se sont adossés à un puits. On peut remarquer le soin apporté aux détails dans les tenues de ces messieurs. On distingue mieux les détails du puits qu’auparavant, notamment on aperçoit les blocs de pierre.
On retrouve ce décor sur les plats de cette époque : avec deux chiens et un écusson avec les armoiries de la Bretagne (hermines). Il est écrit « BRETAGNE » en dessous.
La frise avec liséré jaune et blason ainsi que ce genre de décors bretonnants est typique de cette époque de la fin du XIXè siècle, du temps de la manufacture Porquier Beau à Quimper.
Pour plus d’informations sur les faïences de cette époque, voici quelques liens :
- Le blog d’un collectionneur quimpérois
- L’historique de la faïence de Quimper
-Alfred Beau, un grand nom de la faïence de Quimper
- Le site internet des Faïenceries Henriot
- Le musée de la Faïence de Quimper